Quel État et quelles institutions dans une République écologique ?
En France, les Républiques ont pris naissance lors de « crises » ou « révolutions » (1791, 1848, 1870, 1946, 1958) et jusqu’à ce jour elles se sont terminées par une forme directe ou non de coup d’Etat : De ce point de vue personne ne peut nier qu’un nouveau changement de République s’impose donc aujourd’hui avec force.
Qu’on l’appelle 6è République ou République écologique pour en situer davantage les enjeux, c’est le contenu et lui seul qui est déterminant.
Pourquoi y a-t-il urgence ?
Nous arrivons à la fin d’un cycle : celui qui a consisté à mettre en péril l’avenir de l’humanité en refusant d’admettre qu’on ne pouvait impunément détruire notre écosystème planétaire, qu’on ne pouvait considérer les ressources naturelles et le vivant non humain comme des réserves infinies à piller au profit des seuls humains, qu’on ne pouvait poursuivre la vision d’un monde reposant sur le court-termisme qu’il s’agisse de la course folle aux profits financiers, de la disparition dramatique de la biodiversité, du dérèglement climatique, et en corollaire des atteintes fondamentales aux libertés individuelles et collectives pour tenter de maintenir un statu quo suicidaire.
Nous savons qu’on ne peut pas continuer ainsi et qu’une rupture dans tous les domaines est nécessaire pour que les générations futures puissent continuer à vivre sur notre terre dans des conditions dignes.
La cinquième République illustre jusqu’à la caricature l’absence de vision d’une République écologique : des institutions de plus en plus verticales reposant sur une seule personne et cela à tous les niveaux y compris localement, le primat de l’économie sur toutes les autres considérations, la prochaine échéance électorale comme seul horizon, le refus de reconnaître les réalités diverses des territoires, etc.
L’absence de démocratie réelle fait le lit des populismes et constitue un marchepied à l’autoritarisme voire au fascisme. L’abstention croissante à chaque scrutin et tout particulièrement des plus jeunes, les revendications citoyennes pour une démocratie plus directe, la suspicion voire le rejet des élu.es, la perte massive d’adhérent.es de tous les partis politiques, illustrent les risques potentiels d’un virage illibéral.
Nous avons donc non seulement l’envie mais plus encore la responsabilité de faire naître cette République écologique pour retrouver un équilibre dans tous les domaines :
- équilibre entre la gestion de court-terme et l’indispensable prise en considération du temps long,
- équilibre entre les différentes échelles : les territoires dans leurs différentes composantes et réalités et l’Etat qui ne saurait pour autant disparaître,
- équilibre entre les diverses formes de la démocratie qu’elle soit représentative ou directe,
- équilibre entre les humains et le vivant non humain,
- équilibre dans la répartition des richesses et des ressources pour réduire les inégalités et les discriminations et y mettre fin.
L’espoir soulevé au Chili à la fois par le processus constituant et la victoire du camp progressiste face à l’extrême droite, peut utilement nourrir les réflexions sur les modalités de passage de notre « monarchie républicaine » vers une République écologique. Rien ne saurait être conçu sans la participation citoyenne, sans que le temps indispensable à l’élaboration des propositions soit mis à profit pour que l’ensemble de la population soit partie prenante. Et dans l’attente il est tout à fait possible de modifier les aspects les plus caricaturaux. En tout premier lieu il convient de réduire considérablement les pouvoirs du Président de la République pour retrouver un régime parlementaire. Cela implique de lui supprimer les droit de dissolution, de nomination à de nombreuses fonctions, du statut de chef des armées, de pouvoir mettre en œuvre les pleins pouvoirs à son profit, et présider le conseil des ministres, de décider de la politique de la France dans tel ou tel domaine (et notamment son « domaine réservé »). Tout ceci ne ferait qu’aligner la France sur la plupart des pays qui en ont fini avec le présidentialisme outrancier que nous connaissons. En contrepartie l’Assemblée nationale doit retrouver ses prérogatives grâce à un mode de scrutin proportionnel, seul garant du respect de la représentation des opinions citoyennes. Le gouvernement serait ainsi issu du scrutin et non du choix d’un seul. Les garde-fous pour éviter l’instabilité de la quatrième république sont connus et simples à mettre en œuvre.
Ce qui se passe au plan national doit être décliné à tous les niveaux pour sortir des potentats locaux qui favorisent le clientélisme et le népotisme. Un fonctionnement collégial des collectivités locales, en séparant l’exécutif du législatif, en modifiant la règle électorale pour assurer un meilleur respect des opinions de l’électorat, la réduction des niveaux d’intervention (communes, intercommunalités, départements, régions, syndicats intercommunaux, etc.) afin de permettre aux citoyen.nes de mieux saisir qui fait quoi, sans compter l’indispensable limitation des mandats dans le temps et la mise en place d’une démocratie plus directe aux côtés de la démocratie représentative, constituent autant de réformes urgentes.
Les libéraux prônent en permanence la réduction des moyens et du rôle de l’État au profit du privé arguant de sa meilleure efficacité.
Or c’est précisément la réduction des moyens de l’État qui réduit ses capacités d’intervention efficace et prive les citoyen.nes d’une égalité d’accès aux services publics. Mais pour autant il n’est pas pertinent de défendre un statu quo. L’État (sous des différentes formes, centrales locales, ou via les entreprises publiques) ne saurait rester dans ses modes d’intervention actuels.
La décentralisation de la plupart des politiques publiques hormis les politiques régaliennes, devient chaque jour plus nécessaire. Les territoires sont divers, les spécificités sont réelles, les besoins hétérogènes, leur histoire singulière. Si la loi doit donner une égalité face aux besoins, elle ne peut limiter les droits d’intervention au nom d’un jacobinisme aussi archaïque qu’inefficace. Interdire par exemple à une commune ou une région d’être plus innovante que l’État en matière de lutte contre le réchauffement climatique a-t-il encore un sens ? Les territoires d’Outremer doivent-ils encore être sous le joug d’un État si lointain ? Et que dire du refus de reconnaître les langues régionales malgré la charte européenne de 1992 ?
Si l’État doit être réduit ce n’est pas au profit du privé mais des institutions décentralisées en posant comme principe la subsidiarité. La proximité entre lieux de décision et citoyen.nes est un gage de démocratie. Mais cela ne peut fonctionner que si les institutions locales sont toutes élu.es au suffrage universel direct et au scrutin proportionnel. Cela doit rapidement devenir la règle pour les intercommunalités et les départements. Cela impliquera de proposer des projets pour ces institutions plutôt que privilégier des personnes.
Une démocratie renouvelée, vivante, prenant en considération les enjeux du long terme, refusant la césure croissante entre élu.es et citoyen.es est la meilleure garantie contre les risques autoritaires qui se font jour. Refuser d’aller dans cette direction comme le fait l’actuel Président de la République, c’est incontestablement faire le jeu des partis populistes dont l’objectif final repose sur un pouvoir personnel toujours plus grand au détriment des libertés individuelles et collectives. La République sera écologique ou elle risque de disparaître comme les précédentes.
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